« J’aime profondément la nature et les êtres humains qui vivent à son contact. » C’est ainsi que la photographe Natela Grigalashvili raconte son premier projet. Un travail de plus de trente ans qui livre en images l'amour pour son village natal en Géorgie, Tagveti, dont le nom signifie « Le village des souris ». Elle y a grandi, l’a quitté à 16 ans pour étudier à Tbilissi, la capitale, pour y revenir régulièrement depuis.
Les images rassemblées ici ont été réalisées entre 1988 et 1998, une période transitoire pour le village, mais aussi pour la Géorgie. La chute de l’Union soviétique, en 1991, provoque des événements atroces dans le pays : une guerre civile dans la capitale, et les conflits d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud, deux régions dont la Russie finit par prendre le contrôle. Le pays s’appauvrit, les infrastructures tombent en ruine, comme le montrent ces deux femmes qui rentrent d'un sovkhoze (ferme d’État à l’époque soviétique). Cette traversée périlleuse du tuyau d’irrigation symbolise l'extrême précarité de leurs conditions de vie.
En août 2008, la Géorgie est de nouveau attaquée par la Russie, qui occupe 20 % du territoire depuis. En raison des conflits et des difficultés économiques, l’émigration touche plus de 2,5 millions de personnes dans le pays. Tagveti est aujourd’hui un village en voie de disparition. Il n’y reste plus qu’une cinquantaine de personnes. Natela Grigalashvili continue à le filmer. Le village des souris demeure sa maison, sa vie, sa source d’énergie.