« Pour ce reportage, j’ai un peu forcé la porte. Je voulais raconter une histoire d’agriculture en Île-de-France. La région concentre d’ordinaire plutôt des récits urbains, alors que les terres agricoles y représentent presque 50 % des surfaces. Ça faisait deux mois et demi que je cherchais à visiter la ferme du campus Hectar, dans les Yvelines, créé par le milliardaire Xavier Niel, qui y a investi 18,4 millions d’euros. Elle occupe une immense place sur une seule commune, celle de Lévis-Saint-Nom, et on trouve très peu d’informations précises à son sujet. Ça m’a intriguée. Mais personne ne répondait à mes demandes d’interview.
L’attachée de presse, qui évoquait Hectar comme si elle l’avait fondé, m’assurait qu’Audrey Bourolleau, la comparse de Xavier Niel, voudrait bien me parler… mais dans plusieurs mois, et peut-être seulement au téléphone. « Nous sommes dans une communication maîtrisée », euphémisait-elle alors. Tournant autour, à la recherche d’une histoire, j’ai avancé, écouté, jusqu’à apprendre qu’une réunion d’anciens élèves allait avoir lieu aux Néfliers. Je me suis inscrite, sans cacher que j’étais journaliste, et c’est passé !
Je me suis retrouvée, seule représentante d’un média, dans un événement qui n’était pas destiné au public. Je voulais observer la cohabitation entre les agriculteurs du coin et les starts-up agricoles. J’ai rencontré des entrepreneurs en bottes propres, une coupe de champagne à la main, qui entendaient répondre aux défis du secteur : la crise des vocations, la difficulté des transmissions ou la transition écologique. J’ai eu envie de creuser. »