Ventres à louer en Ukraine

Photo par Axelle de Russé Écrit par Sonia Reveyaz
Ventres à louer en Ukraine
Publié le 27 mars 2023

Elles portent la vie dans leur ventre pendant des mois pour des parents étrangers, parfois plusieurs fois dans leur vie, qui sont ces gestatrices pour autrui ? Jusqu’au début de la guerre, 3 000 enfants par an sont nés d’une gestation pour autrui (GPA) en Ukraine. Donner la vie pour d’autres représente pour certaines femmes le moyen de survivre économiquement.

Depuis 2020, Axelle de Russé documente le monde cruel de la GPA en Ukraine : le business de cliniques parfois sans scrupules, la solitude des mères porteuses et le parcours du combattant des futurs parents. Des situations douloureuses que le déclenchement de la guerre est venu exacerber : « Pour certaines mères, le dilemme est de taille : rester en Ukraine – et risquer sa vie ainsi que celle du bébé qu’elle porte – ou fuir – et accoucher dans un pays où la GPA est illégale ou considérée comme “trafic d’enfant”. »

Une mère porteuse qui réalise un parcours complet reçoit entre 15 000 et 18 000 euros. Des agences s’occupent de mettre en relation mères porteuses et familles du monde entier, souvent recrutées sur les réseaux sociaux. Faute d’une législation claire, ce sont à elles que s’en remettent les deux parties. Deux types de structures existent : des petites agences au service personnalisé et de grosses cliniques, qui brassent des centaines de naissances chaque année.

La GPA reste un sujet tabou ; la plupart des femmes cachent leur grossesse à leur entourage. Aujourd’hui, cette pratique divise : bien qu’elle permette à des couples infertiles ou malades de devenir parents, elle pose des questions éthiques sur la marchandisation du corps des femmes. Axelle de Russé garde en mémoire une interview d’une mère porteuse peu après son accouchement: « Elle a pleuré en évoquant la naissance, tout en me disant qu’elle était heureuse pour la future mère. Ce moment illustre pour moi toute la complexité du sujet. Le choix de la GPA n’est pas qu’un échange commercial, c’est aussi un acte qui laisse des traces psychologiques. »

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