Au début de l’été, quelques semaines après la dissolution, nous avons voulu comprendre les raisons profondes de la fièvre qui s’était emparée de l’élite politique et médiatique française autour du scénariste Éric Benzekri. À entendre journalistes politiques et communicants, il fallait absolument avoir vu les séries de l’ancien porte-flingue de Julien Dray pour comprendre la situation du pays. Qu’est-ce que ce beau monde a vu qui nous avait échappé ?
« Demandez à Éric »
Nous avons d’abord essayé de rencontrer Éric Benzekri pour le lui demander. Par l’intermédiaire de son agent, il a décliné. Puis nous avons interrogé tous ceux qui, en public ou en privé, avaient fait référence à ses séries. Que ce soient ses anciens camarades socialistes – de l’Unef des années 1990, des débuts de SOS Racisme, etc. – ou des militants de gauche l’ayant côtoyé. La plupart ont tenté de se défiler, nous enjoignant de « demander à Éric ».
Julien Dray, Emmanuel Maurel ou encore Jean-Christophe Cambadélis ont accepté. Mais aussi des conseillers en communication, des membres de cabinets ministériels ou des professionnels de la politique au sens large. Nous leur avons demandé de se regarder, comme dans un miroir, face à Baron noir ou à La Fièvre. De décrire ce que ces séries racontent de la politique qu’ils connaissent et ont connue. Mais surtout ce qu’elles nous disent de leur compréhension du réel. Plus notre enquête a avancé, plus nous avons découvert – avec vertige – que, finalement, pour beaucoup de ceux qui doivent proposer des solutions pour notre société, une bonne œuvre de fiction peut remplacer la réalité.