« Tire-lui les cheveux, arrache-lui le masque ! » Sur le ring mexicain, les affronts fusent, les coups sont précis, les mouvements bien exécutés. Pour réaliser cette photographie, Théo Saffroy s’est immiscé dans le cercle restreint de la Lucha libre.
Introduit au Mexique pendant l’occupation française dans les années 1860, le phénomène s’est institutionnalisé en 1933, lors de la création du Consejo mundial de Lucha libre (Conseil mondial de lutte libre). Cette lutte performée est aujourd’hui une véritable référence sportive dans le pays : « Les Mexicains se rendent en famille ou entre amis aux spectacles qui ont lieu plusieurs fois par semaine, c’est un évènement populaire qui rassemble et fédère », raconte le photographe.
Sur l’image, Sagittarius et Artemiz, deux luchadoras (femmes pratiquant la Lucha libre) s’affrontent, une scène qui n’aurait pas pu avoir lieu il y a encore quelques années : « Les femmes ont été interdites de combat pendant longtemps. La société mexicaine a été très conservatrice et n’acceptait pas qu’elles aient des activités en dehors du foyer. Les lutteuses devaient mentir à leurs parents pour s’entraîner. »
Théo Saffroy souhaite alors parler de « celles qui sont derrière le masque ». Au fil des rencontres, il découvre qu’elles ont toutes un passé traumatisant et subissent des formes de violences au quotidien. Grâce au folklore de la Lucha libre qui met en scène des personnages de fiction dans un univers très kitsch à base de leggings fluos et de masques pailletés, les Mexicaines se métamorphosent sur scène. « En incarnant quelqu’un d’autre, elles sortent de leur vie quotidienne. Beaucoup m’ont avoué que la Lucha libre les a sauvées.