Lorsqu’il s’est préparé à aller vivre à Nouakchott, cette ville située au seuil du désert saharien, Michele Cattani s’est dit qu’il lui fallait « bon gros 4 x 4 bien solide ». Ce sera un Range Rover, au volant duquel le photojournaliste embauché par l’Agence France-Presse (AFP), a descendu l’Italie en 2023 pour rejoindre la Mauritanie. Neuf mois après son arrivée, il ne fait que « galérer » avec sa voiture ultra-moderne : « Au volant de mon Range Rover moderne sensé être conçu pour les dunes, je me fais constamment dépasser par des vieilles Mercedes déglinguées qui avancent sans effort ». Sans parler du fait que les pièces détachées ne sont jamais disponibles.
Toutes les photos de ce reportage qu’il a proposé à l’AFP ont été prises en une journée. Il n’y a pas le choix, quand on travaille pour une agence de presse – les délais y sont très courts. C’est donc le jeune chauffeur de taxi Ousmane qui a accepté de l’emmener, en 190 bien sûr, d’abord à Ksar au temple des garagistes puis à travers la ville pour arriver à sa bordure sud-est, à Tarhil.
Prudence habituelle
Malgré le fait que le photographe ne parle pas la langue locale, l’hassanya, un dialecte de l’arabe, l’approche fut facile et ses interlocuteurs tout à fait disposés à montrer leurs véhicules. Pourtant, témoigne ce correspondant qui a vécu cinq ans au Mali et deux autres à cheval entre l’Italie et le Sahel central, « les Mauritaniens sont parfois méfiants avec les photographes et les journalistes ». Dès qu’il annonce que son reportage porte sur la 190, alors qu’il doit habituellement faire preuve de prudence, les Nouakchottois ouvrent grand les yeux et n’hésitent plus à livrer de nombreux détails. Michele Cattani a observé le même phénomène à Bamako, en réalisant un sujet sur la popularité des scooters Vespa dans la capitale malienne.
Visuellement, le photographe a mis du temps à « voir l’intérêt esthétique de Nouakchott, car ce n’est pas une ville facile à photographier ». Les photos prises dans les pays d’Afrique où il pleut beaucoup bénéficient souvent d’un ciel bleu et de lumières contrastées. En Mauritanie, les couleurs sont plutôt des aplats de teintes uniformes, du ciel au sol. Mais avec le temps, Michele Cattani s’est surpris à admirer ces « couleurs pastel magnifiques ». L’air, toujours chargé des poussières du désert, a aussi tendance à donner aux photos une atmosphère irréelle. L’impression, s’enthousiasme le photographe sans doute en pensant à ses prochains sujets, que « les images sortent tout droit d’un dessin ».