Alors que les risques d’un conflit polaire entre la Russie et l’Occident se concrétisent, les soldats finlandais, norvégiens, américains et canadiens multiplient leurs entraînements dans l’Arctique. Le photographe Louie Palu suit depuis dix ans la militarisation de cette région où le vent et le froid sont, eux aussi, des ennemis.
Alors que les risques d’un conflit polaire entre la Russie et l’Occident se concrétisent, les soldats finlandais, norvégiens, américains et canadiens multiplient leurs entraînements dans l’Arctique. Le photographe Louie Palu suit depuis dix ans la militarisation de cette région où le vent et le froid sont, eux aussi, des ennemis.
Soudain, les Ukrainiens ont surpris le monde entier. Le 1er juin 2025, utilisant uniquement de petits drones cachés par un camion à quelques kilomètres de la base militaire russe d’Olenia, au-delà du cercle polaire arctique, ils en ont déjoué le système de défense et détruit plusieurs bombardiers. Il s’agit de l’attaque la plus dévastatrice jamais menée contre des bases russes, selon Kristian Åtland, chercheur à l’Institut norvégien de recherche sur la défense.
Il y a dix ans, de retour de la guerre d’Afghanistan, le photographe canadien Louie Palu a parié que le nouveau front de guerre serait justement dans l’Arctique. Il a commencé à suivre la militarisation de cette zone bouleversée par le changement climatique – elle se réchauffe quatre fois plus rapidement que les autres régions du monde –, les rivalités géopolitiques et les échos de l’ambition coloniale qui s’y jouent. « C’est aussi la route la plus courte entre la Russie et les États-Unis. S’il y a une attaque contre les États-Unis, c’est par là qu’elle va passer », commente le photographe.
Pearl Harbor au pôle Nord
Louie Palu semble avoir gagné son pari. Avant 2025, aucun conflit n’avait touché le Grand Nord depuis la Seconde Guerre mondiale avec, en 1939, ce qui a été appelé la « guerre d’Hiver » entre la Finlande et l’Union soviétique. Aujourd’hui, une guerre polaire entre la Russie et l’Occident semble plus proche que jamais. Selon le magazine russe Verstka, les « blogueurs Z » soutenant le conflit en Ukraine et les correspondants de guerre ont comparé l’attaque du 1er juin à Pearl Harbor.
Avec plus de quarante voyages au pôle Nord, dix ans de travail et le soutien de plusieurs institutions, dont la prestigieuse fondation John-Simon-Guggenheim, Louie Palu nous raconte les entraînements militaires autour de cette frontière précaire. Le titre de sa série photographique Distant Early Warning, produite avec l’aide du Pulitzer Center, est un clin d’œil au système radar du même nom, construit par les États-Unis et le Canada dans les années 1950 par crainte d’une attaque nucléaire russe au-dessus de l’Arctique. Ces images nous forcent à porter notre regard sur une zone fragile « où tout peut arriver ».
Des soldats canadiens équipés de fusils d’assaut, de mitrailleuses et de munitions marchent lors d’un exercice sur l’île Cornwallis, dans la région du Nunavut, au Canada, en mars 2024. Un entraînement au combat et à la survie dans une contrée où les températures peuvent atteindre −50 °C.Ce soldat finlandais apprend à des Américains à se débrouiller dans une eau extrêmement froide, lors d’un entraînement conjoint au combat hivernal dans une base militaire à Sodankylä, en Laponie, en février 2023.À Crystal City (Nunavut), en mars 2024. Le caporal Anuga Michael, membre des rangers canadiens, enseigne aux soldats du sud du pays comment opérer dans l’Arctique.Des soldats canadiens tentent de récupérer des blocs de neige provenant d’opérations passées afin de construire des murs autour de leurs tentes pour se protéger du vent et du froid extrême. Crystal City, mars 2024.Un soldat américain construit un abri de survie à l’aide de rondins, de morceaux d’arbres, d’un parachute et de neige, au cours de la formation Cold Weather Leaders (« chefs d’équipe en environnement froid »). Dispensé par l’armée américaine, ce cursus est destiné aux membres de la 11e division aéroportée, qui s’entraînent à mener des opérations dans un environnement arctique. Alaska, septembre 2023.Des militaires finlandais participent à l’exercice Kontio 22, dans la région de Nurmes, en Carélie du Nord, en novembre 2022. Le scénario consiste à repousser une invasion à la frontière. L’exercice mobilise jusqu’à 8 000 soldats et se déroule à la date anniversaire de la guerre de 1939 entre la Finlande et l’Union soviétique, à proximité des terres finlandaises annexées par l’URSS.Un peloton d’infanterie, une unité d’intervention et une unité de chars s’entraînent aux tirs réels avec une batterie de lance-roquettes et une batterie d’artillerie lourde, durant l’exercice de l’armée finlandaise Arctic Shield 18 à Rovajärvi, en Laponie, en 2018.Un char finlandais camouflé dans une forêt près de Nurmes, en 2023, lors d’un exercice militaire simulant l’invasion du pays par une armée étrangère.Un plongeur norvégien spécialisé dans la neutralisation des explosifs militaires intervient dans la région de Narvik, en Norvège, en 2020. Dans cette zone, des milliers de munitions navales, de mines et de bombes non explosées datant de la Seconde Guerre mondiale continuent d’être découvertes.Des militaires norvégiens à ski dans une région centrale de la Norvège, en 2020. Le ski a longtemps été le moyen de déplacement le plus efficace et le plus discret pour les soldats au sein des régions arctiques européennes.