La longue histoire des Juifs de Thessalonique, en Grèce, s’est arrêtée avec la déportation par les nazis de la quasi-totalité de la communauté et la destruction de son cimetière. Parti sur les traces de ses ancêtres, le photographe français Martin Barzilai a fait une étonnante découverte : disséminées dans la ville, les pierres tombales ont servi à reconstruire de nombreux bâtiments.
Du XVIIe siècle aux années 1920, la communauté juive a été majoritaire à Thessalonique, qu’on appelait parfois la “Jérusalem des Balkans”. En 1943, 48 000 personnes, soit 96 % de cette population, ont été déportées – pour la plupart à Auschwitz-Birkenau. Le cimetière juif, qui était le plus grand d’Europe (entre 300 000 et 500 000 tombes), a été détruit en décembre 1942 sur ordre des Allemands. Après la guerre, personne n’a mis de plaque pour indiquer la présence du cimetière et une partie des pierres tombales a été utilisée pour des chantiers. Pendant des décennies, la majorité des habitants ignorait l’histoire juive de la ville.
Les fragments du cimetière se retrouvent dans une vingtaine d’endroits de la ville que ce soit sur le dallage autour de l’emblématique Tour blanche ou, comme sur la photographie, sur le mur d’enceinte de la gare ferroviaire inaugurée en 1961. De nombreuses traces ont été découvertes par hasard. Grâce au travail d'historiens, d'archéologues et des citoyens, la mémoire des Juifs de Thessalonique s'inscrit dans la pierre.